Le Cnam mag' #5 - page 12

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L’invité de la rédaction : Jack Lang
Depuis trois ans, vous avez réussi à donner un
second souffle à l’Institut du monde arabe. Qu’est-ce
qui vous a poussé à accepter sa présidence?
Toute ma vie j’ai été convaincu que la culture ne pouvait
pas être d’un seul pays. Les cultures s’irriguent les unes
des autres, se nourrissent. Toute ma vie j’ai considéré
que notre avenir était indissociable de celui du monde
arabe avec qui nous partageons une mer commune, la
Méditerranée. Aujourd’hui plus que jamais, je suis
convaincu que notre avenir est intimement lié à celui de
nos voisins qui sont aussi nos proches et mêmes nos
concitoyens puisqu’ils habitent nos villes et nos cam-
pagnes. Ces pays du sud de la Méditerranée ont autant
besoin de nous que nous avons besoin d’eux. Leurs fils
qui ont choisi de vivre parmi nous
sont riches de leur double apparte-
nance. L’Institut du monde arabe
est cet endroit privilégié où se ren-
contrent les deux rives de notre
commune Méditerranée. C’est pour cela que j’ai, avec
enthousiasme, accepté la proposition qui m’était faite de
prendre la tête de l’Institut du monde arabe dont cette
rencontre est la vocation première.
À sa création en 1987, l’IMA avait notamment pour
vocation de renforcer les relations diplomatiques
avec les pays du monde arabe. Est-ce toujours le
cas?
Si la vocation de l’IMA était de renforcer les relations
diplomatiques avec les pays du monde arabe, il aurait
fallu en confier la présidence au ministre des Affaires
étrangères. Les relations diplomatiques entre la France
et le monde arabe sont d’une extrême importance. Je
dirai même qu’elles sont prioritaires. Mais la vocation de
l’IMA est d’une autre nature. Ce sont les peuples qu’il
s’agit de rapprocher. Ce sont leurs préjugés qu’il s’agit
de détruire. Ce sont leurs cultures dont il faut encoura-
ger le dialogue.
L’IMA et le Cnam viennent de signer, le 3 juin dernier,
une convention pour développer l’apprentissage de la
langue arabe. En quoi cela vous semble important
dans le contexte actuel ?
L’apprentissage de la langue arabe est pour moi une
priorité. C’était déjà la mienne lorsque j’étais ministre de
l’Éducation nationale. C’est encore la mienne
aujourd’hui. Parmi les grandes lan-
gues de civilisation, l’arabe est
celle qui est actuellement le moins
enseignée en France. Il faut renver-
ser cette tendance. Pour cela il faut
se pencher sur la didactique de cette langue et créer les
moyens d’une évaluation rationnelle des progrès accom-
plis par les apprenants. C’est ce qu’est en train de faire
la direction des études de langue de l’IMA en relation
avec l’éducation nationale. Aussi difficile que puisse être
son apprentissage, il faut que ceux qui désirent
apprendre cette langue sachent que nous sommes en
mesure de leur en garantir l’accès. C’est là une des pre-
mières ambitions de l’Institut du monde arabe.
Pour beaucoup de Français, vous restez
l’emblématique ministre de la Culture de François
Mitterrand. Que retenez-vous de la politique que
Notre avenir est intimement lié
à celui de nos voisins qui sont
aussi nos proches»
«
Peut-on résumer une vie en quelques lignes
?» me confiait Jack Lang. Celui qui se définit comme
un «
réaliste révolutionnaire
» est en effet de ceux dont retracer la biographie relève du défi ! Car,
s’il reste l’emblématique ministre de la Culture de François Mitterrand, il fut aussi, et notamment,
acteur, professeur, directeur du théâtre de Chaillot, secrétaire national du Parti socialiste à l’action
culturelle, ministre de l’Éducation nationale, député-maire de Blois... Pourtant, derrière toutes les
facettes de cette exceptionnelle carrière, c’est bien son engagement pour toutes les cultures et son
combat pour leur démocratisation qui lui servent de guides depuis plus de cinquante ans.
«
L’IMA est cet endroit privilé-
gié où se rencontrent les deux
rives de notre commune
Méditerranée
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